Saturday, January 21, 2017

et c'est à mon tour...

Je me rappelle d'un coup de téléphone, l'été passé, lors d'une balade  avec mes deux enfants dans les forêts andennaise. "Allo Denis, c'est Victor ? Cela te dirait de donner cours de DFS avec moi l'année prochaine ?"... "Quoi ? juste nous deux ?" A ce moment là une pointe de stress et d'excitation monte en moi ainsi qu'un milliard d'autres choses... Victor, il faut que je réfléchisse, j'ai mon labo à monter, mes cours en physique à donner et plein de projets à démarrer et à concrétiser,... Je laisse languir Victor un moment tout en sachant que mon instinct avait déjà choisi...

Il faut dire que cela fait un moment que j'interagis avec le Fablab et les cours qui y sont donnés. Après chaque participation à un jury de DFS, je reviens chez moi et mon cerveau bouillonne, il part en vrille et le lendemain ça continue, ... Un jour, j'ai même projeté un milliard de rêves qui d'un coup me semblait possible. Le lendemain, je stressais, je me demandais comment j'allais opérer si je devais faire en sorte que ces rêves se réalisent... C'est là que j'apprends la discussion entre mon cerveau droit et mon cerveau gauche. Apprivoiser ces deux là et leur apprendre à collaborer est tout un exercice...

Ce qui me frappait le plus chez les étudiants de Victor et David, c'est qu'ils étaient rayonnants , pleins de passions et très motivés par leurs projets. Mais j'étais surtout fasciné par le chemin créatif que Victor et David leur faisaient parcourir, c'était très très élaboré. L'environnement des étudiants est peaufiné et adapté, l'interaction entre les étudiants, les deadlines, les maquettes à rendre, ... Tout est organisé pour propulser et pour dynamiser les projets. C'est tout le contraire d'un cours où on évalue de manière sèche et définitive le projet final. Ici, c'est le chemin qui est mis en valeur. J'adore !!! Les étudiants sont mis en confiance, ils apprennent à se connaitre et développent des outils d'une extrême importance pour leur avenir (et le nôtre)... J'apprends à accepter la subjectivité et que suivre son instinct peut pousser des projets très loin. Pour peu que l'on apprivoise l'instinct, il est mille fois plus rapide que la partie rationnelle de notre cerveau, le néo-cortex... En science, on est formé dans la rationalité, sèche, froide, dure, ... parfois triste car dénuée d'émotions... Alors que si on regarde dans l'histoire comme se sont faites les grandes découvertes, on découvre un monde de passion, de créativité pure, du farfelu, avec du rationnel aussi ... C'est là que je lis et creuse les histoires de grands scientifiques : Henri Poincarré, Hubert Reeves, Einstein, Feynman, Oppenheimer (pas Robert, Franck son frère, l'oncle de la bombe atomique), Leonard de Vinci, ... N'oublions pas l'un des plus fascinants (le physicien préféré de mon épouse qui est aussi physicienne, c'est de famille): Michael Faraday. Ce petit relieur de livre qui a appris la science en autodidacte (!), un intuitif complet, touche-à-tout et qui a eu du mal à se faire une place dans le monde scientifique vu son parcours atypique... Il y arrive néanmoins à occuper une place parmi les plus grands grâce à ses fabuleuses découvertes en électromagnétisme. Il est quand même à l'origine du mécanisme de base de tous les moteurs électriques... Je découvre aussi Maxwell, un parcours scientifique à l'opposé très très classique et qui est aussi à la base de grandes découvertes... Il y a donc plusieurs chemin qui peuvent mener à la créativité...

Et puis, je rencontre Elmar Mock, le co-inventeur de la Swatch. Cette rencontre transforme ma vision de la découverte et de l'innovation. J'en apprends aussi beaucoup sur moi-même et d'une certaine manière offre une réconciliation entre mon cerveau droit et mon cerveau gauche...
Je continue mes recherches et rencontre le moine Satish Kumar, une rencontre éblouissante qui me pousse à persévérer...

Mais quelque chose me turlupine toujours, pourquoi n'enseigne-t-on pas cela aux étudiants ?

C'est là que nos discussions (nombreuses très nombreuses...) démarrent avec Victor, on réfléchit au système, à l'institution, au cadre, à la culture, ...  Pour ma part, cette réelle remise en question a débuté lors mon séjour postdoctoral au MIT aux USA (après avoir fini ma thèse de doctorat).  Cambridge (US) est un lieu très multi-culturel où les atypiques abondent ! Le MIT s'est fait une réputation de rameuter les geeks les plus weirdos d'Amérique du nord et de leur donner les conditions pour s'émanciper. Des weirdos, j'en ai vu... des étudiants de première qui résolvaient des intégrales (avec des signes mathématiques que je n'avais jamais vu...) en un coup de regard et un trait de craie au tableau. C'était fou !
A partir de là, il y a deux possibilités: soit tu flippes, tu te sens bête et tu te replies sur toi même... C'est d'ailleurs un problème à MIT et Harvard. Certains étudiants de notre cours pourraient se retrouver dans cette position parce que des weirdos, tout au long de notre cours, on en a rencontrés... ;-) ), soit tu acceptes de vivre avec des gens différents, tu apprends à les respecter et à te nourrir de leur culture et de leurs capacités différentes et souvent complémentaires. C'est en suivant cette deuxième voie, que démarre vraiment l'aventure, excitante, enivrante ... Beaucoup se demanderont (comme moi...) mais qu'est-ce que j'ai à offrir ? je ne sais pas résoudre des intégrales en deux coups de cuillère à pot...  En m'intéressant à ce sujet, je participe à un séminaire où une psychologue nous parle du "syndrome de l'imposteur", fascinant ! C'est un syndrome qui sévit surtout dans les grandes institutions qui touchent souvent les expatriés et plus particulièrement les femmes... Tiens tiens... 
Tout le monde étant dans le même bateau, soyons authentique et faisons ce que nous pouvons du mieux que nous le pouvons et si un groupe a besoin de nous, c'est que l'on apporte quelque chose à ce groupe... donc interagissons et laissons nous guider par notre instinct !

Ce sont ces nombreuses expériences qui font le physicien que je suis...

Bon revenons au cours ;-)

En septembre, pour préparer le cours, on rencontre la cellule enseignement PRACTICE de l'ULB  et notre réunion est des plus bizarre qu'il soit. On est à deux semaines du début du cours et on n'est pas encore sûr de la manière avec laquelle on va l'aborder. Victor aussi me fait flipper parfois... je suis habitué à la rigueur, la précision, à la "cristallinité" ! Mais j'ai confiance ! car j'imaginais ce cours comme une jungle dans laquelle se cache un trésor. Mais nous ne savons pas ce qu'il y a dans cette forêt vu que c'est complètement nouveau... Nous avons donc fait la chose la plus importante et la plus logique qu'il soit: nous préparer et nous apprivoiser.  Avant de me lancer dans cette aventure, il me faut avoir une confiance aveugle en Victor et que l'on soit capable de combler les faiblesses de l'un et de l'autre...

Je propose à Victor et à David, le test ultime ! Un test ambitieux. Victor et David, voulez-vous venir avec moi à 2 jours de conférence dans mon domaine de la physique à Paris. On va y rencontrer des types vraiment balèzes et on parlera de la mécanique du pli (origami)... oui oui... Entre parenthèse Victor et David ont des choses à raconter à ce sujet-là, ils ont supervisé plusieurs projets de structures architecturales inspirés d'origamis. Je sens Victor flipper... mais j'insiste. David sur ce coup là, fonce. Il  faut qu'ils comprennent comment je réfléchis. Bon cette conférence promet d'être atypique car elle va aussi se faire avec des philosophes... oui oui, des philosophes qui vont nous parler de plis... incroyable, les philosophes étudient les plis, les bons plis et les moins bons plis... Nous profiterons du voyage pour préparer ce cours.
Je suis absolument étonné de la capacité d'adaptation de Victor et de David, ils se fondent dans les physiciens, les plasticiens et les philosophes. Quand Victor et moi, n'en pouvions plus des philosophes, David restait dans la salle de conf ! Il en avait du courage et il semblait comprendre, il avait en plus quelque chose à dire dessus... incroyable, on est vraiment différent et c'est ce qui est fort... Je me souviens aussi de Victor commentant le travail de ma communauté... "En fait, vous les scientifiques, vous avez ce besoin de tout contrôler et de ne rien laisser au hasard...." C'est vrai que c'est l'attitude que l'on affiche alors que ce n'est pas toujours comme cela que cela se passe dans le labo... Notre manière de travailler est en fait bien cadrée et j'éprouve ce besoin de sortir du cadre et de me libérer pour faire des choses qui ont du sens... Voilà, notre séjour à Paris se termine et "l'épreuve" pour David et Victor est un succès et je n'ai plus aucun doute que notre cours va déménager. J'ai confiance !

Un capuccino et je continue...

Nous décidons de partir sur 4 semaines où nous parlerons de physique. Nous invitons les 20 architectes  et les 2 physiciens dans mon laboratoire au département de physique. Axel, mon technicien est un peu stressé. Comment gérer cette bande de néophytes dans un labo où on fait de la science ? On explique quelques règles, je leur explique la démarche scientifique et on lance les étudiants sur un défi. A l'aide d'une feuille A4, faites la structure la plus grande. Et là tout le monde s'affaire... Les idées circulent de personnes en personnes jusqu'à avoir une structure haute de 7 étages (avec une feuille A4) !!! L'après-midi, on pousse les étudiants à faire de l'expérimentation libre... Ils ont plein de matos, des livres, des scientifiques, un technicien, des machines de fabrication digitale. Identifiez une petite expérience à façonner et présentez-la aux autres en fin de cours. La directive semble trop ouverte et ce n'est pas facile pour les étudiants. Autant un enfant de 4 ans ne se poserait pas tant de questions et prendrait son pied dans un laboratoire rempli de matériel autant certains étudiants étaient frigorifiés ou un mode "stand-by" en attendant que cette torture passe... 
Je me souviens de cette discussion avec Anthony : Anthony: "Je peux vraiment faire ce que je veux ? Mais je n'ai pas d'idée... et puis c'est nul... et surtout ça ne marchera pas..." Je lui réponds "mais vas-y fonce, tu as tout le matériel devant toi"... A: "Aller ok". 10 minutes après il avait un système qui fonctionnait et mieux encore, il avait des idées pour l'améliorer... En fin de cours, tout le monde partage ses découvertes. Certains sont fort motivés et d'autres beaucoup moins voire pas du tout. Mais cette fois-là, j'étais très content d'avoir mes deux étudiants physiciens Simon et Elisabeth qui généraient une énergie débordante, de véritables moteurs... Ils étaient dans un domaine qu'ils connaissaient et étaient hypra-motivés. Je vais pouvoir compter sur eux pour mettre de l'énergie dans ce cours ! Le soir, on s'appelle avec Victor. On est super heureux parce qu'on s'est éclaté... mais cela va être dur...

Les étudiants d'archi ne sont pas tous très coopératifs, ils arrivent en retard (1h ou 2h, c'est une habitude chez eux apparemment), ils ont l'habitude de flâner toute l'année et de "rusher" la dernière semaine avant le jury mais ici cela ne pourra pas se passer comme cela, on a besoin de faire le chemin ensemble (!) tout au long du quadrimestre... Je rappelle que nous sommes dans la jungle, si on perd un étudiant en route... il va se faire dévorer tout cru par des bêtes sauvages...

Les premières semaines avec Victor sont fascinantes. J'ai même constitué une mallette du physicien avec des milliards de jouets (physiques), d'appareils de mesure, pour explorer le monde et improviser des petites expériences de coin de table. Je me rends compte que quand je vais à Flagey, je peux me lâcher et explorer de nouvelles manière d'aborder de la physique... Avec Victor, on fournit énormément d'énergie dans le système. Les étudiants doivent être présents à toutes les séances, ils doivent être à l'heure... Ensuite, on casse continuellement les quelconques routines qui peuvent se mettre en place. On varie toutes les activités tout le temps. On travail l'intuition physique quelque chose que l'on ne fait pas avec nos étudiants physiciens ( les travaux du Prof. Eric Mazur à Harvard le prouvent). A la fin des cours, on demande aux étudiants de rentrer tantôt une introspection, tantôt un rapport de type scientifique, tantôt une vidéo pédagogique ou une image résumant leur travail. Rapidement avec Victor, on se dit qu'il faut que l'on garde une trace de tout cela comme si on devait faire une cartographie de la jungle que nous débroussaillions... On monte le blog que vous lisez actuellement. Mes capacités à redevenir cristallin par moment sont à ces moments-là très utiles. 

Victor lui à cette capacité à sentir l'énergie des groupes, à improviser et à modifier la situation quand cela s'avère nécessaire. C'est une aptitude incroyable... On est dans un flow... on ne s'arrête pas et ça bouge vite, très vite, ...

Mais pour arriver au bout du cours, il va falloir encore accélérer !!!
Mais comment faire ?
Victor a une idée. Une semaine de résidence... Un truc d'archi. On sort de Bruxelles et on vivra pendant une semaine avec des machines et nos projets. Cela va donner une énergie toute particulière au groupe et va booster tous les projets. On regarde une vidée de la manière dont fonctionne la société IDEO situé dans la Silicon Valley. Ils produisent des innovations avec des équipes pluridisciplinaires et multi-culturelles. Il va falloir façonner une énergie de groupe si on  veut arriver au bout. On se rend compte comme c'est incroyable, que de manière générale, des étudiants vont suivre une éducation pendant vingt années de leur vie et n'auront peut-être jamais appris ce qu'était la vraie collaboration, le vrai travail d'équipe avec de l'entraide, de l'altruisme, du respect et du sens commun...

Allez on part, à Andenne ? à Gesves ? à Mozet ? et finalement on termine au Superlab dans un bâtiment désaffecté d'une superficie de 20 000 mètres carrés à Anderlecht... Incroyable, on est complètement hors de notre zone de confort... C'est là que Michele, nous rejoint, l'ingénieur de l'EPFL qui peut réparer une machine à laver avec un réacteur d'avion de chasse. Michele qui bouquine des bouquins de Physique le matin dans sa voiture avant de nous rejoindre. Michele, l'incollable et le généreux, qui a toujours quelque chose à apporter. Un weirdo complet !!

Si je développe notre expérience au Superlab, je sens que mon introspection n'en finira pas... Je préfère alors passer le relais aux étudiants pour l'introspection. Ils en ont chacun fait une à l'issue de cette aventure et elles sont postées sur ce blog.
Cette semaine de résidence à été un moment charnière et catalysant pour le groupe, les étudiants et leurs projets... En un mot, c'était incroyable...
Je me rappelle quand même nos petites balades avec Victor à bord de sa 2 chevaux dans Anderlecht... On refaisait le monde... J'apprenais plein de truc comme une éponge prête à recevoir un enseignement. J'étais complètement hors de ma zone de confort mais c'était bon, magique... merci.
Et puis, ces soirées mémorables avec les étudiants et ces repas partagés... Ah les repas que l'on prépare ensemble, c'est un élément clé dans l'énergie de groupe, les négociations pour le skate park aussi... Et puis on a quand même tenu jusqu'au bout avec Victor, on est resté dormir dans le froid de canard quand tous les étudiants avaient décampé pour retourner dans leur kots chauds et douillets. Le soir et la nuit, avec Michele et Victor (qui s'endormait sur sa chaise) nous continuions nos discussions sur la thermique, le zibro kamin, les milles vies de Michele,... Le matin on retrouvait nos étudiants, c'était chouette.

Au retour, le blues... Les étudiants sont fatigués et nous aussi. Et puis c'est la fin du mois de novembre...
A l'issue de la résidence, chaque groupe d'étudiants a trouvé son phénomène physique. Ils sont tous différents et très chouette ! Maintenant il va falloir penser à l'architecture... Mince, on en a encore du boulot.
Pour relancer l'énergie, Victor est plein de ressources. C'est la partie du cours qui était la plus difficile pour moi. Le blues combiné à la recherche d'archi, c'était dur... Mais heureusement Victor était là et c'est ça un bon équipier. Il peut prendre le relais quand c'est nécessaire surtout quand il en a les compétences.

Un autre changement après cette résidence est l'ambiance dans mon propre labo au département de physique. Les deux étudiants physiciens qui suivent DFS font aussi un mémoire chez moi. Et lors de la réunion de labo, je sens une transformation. Les étudiants ont pris possession de leur sujet. Ils se sentent responsables et investis. Ils produisent leur propre énergie. C'est fort. A posteriori, c'est quelque chose que j'espérais avec ce cours et je pense ne pas m'être trompé. L'expérience était ambitieuse mais Simon et Elisabeth ont été courageux ! merci à eux d'avoir tenu jusqu'au bout. Maintenant il faut que j'intègre cette dynamique dans notre travail de recherche et ça ce n'est pas facile, ce n'est pas la méthode dominante chez les scientifiques... (ce qui est bizarre en fait).. Le pari c'est qu'en développant des activités interdisciplinaires, on peut renforcer des activités disciplinaires, pour cela on a besoin de former des T-Shaped researchers [Brown, Nature, 2015].

Pour redonner de l'énergie au groupe de DFS, on retourne au Fablab. On a besoin de grandes tables partagées, de bazar, de machines qui tournent, de bruits, de colle qui sent et des gens divers et variés qui passent avec des projets plus fous les uns que les autres. On a besoin d'être au Fablab. On ressent au Fablab, une atmosphère de sincérité, de confiance, de respect, d'entraide, d'altruisme et tout cela avec des gens différents, très différents,... des weirdos. A l'heure où tristement les nationalistes et le repli sur soi ont le vent en poupe, une étude sociologique sur les interactions entre les gens au fablab serait plus qu'intéressante... Le repli sur soi est une fuite face à la complexité du monde. Nous nous apprenons à nos étudiants à l'embrasser jusqu'à ne plus pouvoir s'en passer ! 

Nous apprenons à nos étudiants à aller de l'avant, à rencontrer des obstacles, à ne pas les redouter et  à les contourner par des solutions innovantes.
Nous enseignons ce que nous pratiquons, c'est exactement dans cette dynamique que nous interagissons et développons le cours.
Il y a à ce propos une phrase de l'introspection de Thierry qui m'a beaucoup interpellé:  "tout ceci me fait dire que quelque part je commence à découvrir ‘ma zone de confort dans l’inconfort’;"

L'énergie reprend on arrive proche de la Noël, le pré-jury approche. Le vendredi avant le pré-jury est déprimant. Les étudiants ne prennent plus de risques ils se réfugient dans leur zone de confort, ils reprennent leurs mauvaises habitudes... Ils ne sont plus innovants. Je suis dur. Je téléphone à Victor au soir, ouf c'était vraiment difficile aujourd'hui.

Le jour du préjury, les étudiants présentent un pecha-kucha et leurs réalisations au Fablab. C'est chouette, tous les projets donnent quelques choses d'intéressants. David nous rejoint il est dur avec les étudiants mais sincère et juste (comme le disait Victor). L'année prochaine, avec David, son savoir et sa vision fort différentes de la nôtre par moment, on formera une équipe du tonnerre. ;-)
Victor et moi sommes sur un petit nuage, les étudiants sont passés par de multiples étapes, des déceptions et des succès, des moments de passage à vide et des moments de créations intenses. Un chemin complètement non-linéaire mais qui aboutit à quelque chose et souvent quelque chose d'étonnant, il suffit d'avoir confiance et d'aller de l'avant. On est plus qu'heureux. Victor un jour m'a dit, on réussira vraiment le cours quand tout les étudiants y arriveront. On ne peut laisser personne derrière, il faut mettre l'énergie là ou c'est nécessaire pour pousser toute la classe. Cela n'a pas toujours été facile... mais nous avons fait notre maximum et je pense que ça a quand même réussi. Il faut dire qu'on ne les a pas lâché ces étudiants. On ne laisse personne dans la jungle !!! ;-)

Et puis le jour du jury, nous avons constitué un jury assez improbable avec un physicien des particules, un artisan verrier/bijoutier, un architecte urbain, un entrepreneur expert en impression 3D, un plasticien sculpteur, un acteur de la diffusion de la science physique à l'ULB, un responsable de l'aménagement d'espaces à Seraing,... C'était vraiment chouette de les voir interagir avec les étudiants. Et ce jour là je me suis peu utile. Je suis arrivé le matin et sur une idée de Thierry, les étudiants avaient transformé le grand studio avec des maquettes dans tous les sens. J'étais juste impressionné ! Ces étudiants ne font pas juste ce qu'on leur dit, ils ont de l'autonomie et veulent pousser leur projet loin très loin. Et ceci sans compétition entre eux..

Quand je repense aux différents groupes je repense à Pierre et Félix, les deux têtes de mules qui cherchaient midi à quatorze heure alors que c'est le jour du jury final qu'ils arrivent avec une solution simple élégante et efficace... à leur image. bravo. Pierre et Valentin qui se sont lancés dans les structures bi-métalliques. Ils étaient comme un TGV que rien ne pouvait arrêter, autonomes et n'ayant peur de rien (ils faisaient des pages et des pages de calculs de courbure, interagissaient avec des doctorants à l'école polytechnique,...). Wow. On avait peur pour l'archi et finalement, ils nous ont bluffés. Anthony et Elisabeth, Anthony est un dur à cuire et Elisabeth a retrouvé son âme de créatrice... Au final, on ne sait pas qui est le plus archi des deux ;-) Simon, Jérémy et Jean, le groupe parabole. Un groupe efficace, au début un peu perdu et qui avait certainement les capacités de prendre plus de risques mais qui a su trouver sa voie au final et construire une superbe parabole géante. Adnane et Bach et leur caméra obscura, cela n'a pas toujours été facile et c'est encore une fois pour le jury final qu'ils se sont lâchés et ont proposé de chouettes systèmes. Tho-Phuoc et Carlos et leur champs de blé géant dans lequel je suis impatient de pouvoir me balader. Marta et Illona, notre groupe autonome complètement décalé et déjanté. Avec Victor, nous ne pouvions faire que regarder et suggérer, Marta et Illona était animées d'une passion éblouissante. C'est l'un des groupes qui a pris le plus de risques. Alexia et Lorette, alors là, pas toujours facile... mais en persévérant on y arrive. Je pense que c'est la leçon qu'elles auront également retenues. bravo. Matthieu et Emile et leur système de dépollution. Vous n'étiez pas tout à fait convaincus au début du cours et finalement vous sortez un prototype proche de la commercialisation... Et puis, il y a Thierry, qui plane complètement maintenant, assidu et de bonne volonté depuis le début qui a su combiner une multitude de savoirs et savoir-faire. Il a été propulsé sur la stratosphère avec un système de construction très très avancé. Je n'oublie pas Christophe et Francesca qui ont émerveillé la salle du jury avec leurs constructions du PASI à l'échelle 1:1. Aussi, tous les groupes, vous nous avez présenté et démontré des systèmes qui fonctionnent ! Ce n'était pas de la simple image, du marketing, du blabla, c'était de l'authentique avec ses forces et ses faiblesses !

Et puis, comme Victor l'a fait remarqué, notre plus belle récompense, c'est la petite flamme que l'on voit dans les yeux de certains et les sourires. Et oui les sourires tout simplement... sans parler des petites danses de Marta dans la salle des découpeuses laser...

Cette histoire est une utopie de faire de ce monde, un monde meilleur, plus tolérant, plus respectueux, pour lequel on a envie de se battre ensemble, pour nos enfants ... Une histoire dans laquelle, tout le monde est le bienvenu et dans laquelle on rencontre plein de gens fantastiques qui transforment nos vies par leurs particularités et leur savoir-faire, leur envie d'aider ...
L'aventure continue...

Enfin je résumerais notre relation avec Victor d'assez particulière, unique. 
J'ai été récemment interpellé par l'amitié de Montaigne et de La Boétie, deux personnages très différents liés d'une amitié que l'on rencontre qu'une fois tous les 300 ans... Selon Montaigne, l'amitié véritable non seulement dévoile autrui mais nous apporte également une plus grande lucidité sur nous-mêmes... Alors, sortons et cherchons des amis, des vrais...

Je  parle comme si c'était acquis mais tout ceci n'aurait pas été possible sans notre cloud de personnes (think tank) qui gravite autour du Fablab. Des gens divers et variés, il y a Jérémy que je viens de découvrir très méthodique et efficace, Michele, le Zébullon qui déboule dans le Fablab à n'importe quelle heure du jour et de la nuit avec un nouveau matériau, un nouveau système constructif, une nouvelle astuce, une nouvelle histoire abracadabrante et qui est d'une générosité sans faille, Victor le catalyseur d'énergie et le rassembleur, David plein de ressource quand il s'agit de création et de conseil technique, Sylvain notre inventeur fou de Lausanne qui fabrique des boites à cigares à des millions de dollars, Thierry notre artisan verrier de Charleroi, Xavier le gazeux, graphiste et photographe de formation qui a monté le fablab d'Andenne... Et j'en oublie plein plein plein d'autres, désolé et merci à tous...

Pour finir,  je citerai une phrase de Démocrite qui me guide :
"Tout ce qui existe dans l'univers est le fruit du hasard et de la nécessité"

Merci à tous !

No comments: